J'ai plusieurs centres d'intérêt, voire passions. L'écriture et les cheveux crépus sont en haut de la liste. Ceux qui me connaissent savent que je donne depuis plusieurs années des conseils capillaires. Je reçois donc souvent des questions, auxquelles je réponds avec plaisir.
Je trouve essentiel qu'en tant que femmes noires nous connaissions nos cheveux, sachions comment nous en occuper. Pour pouvoir transmettre ce savoir à la prochaine génération. Libre à chacune ensuite d’avoir ses préférences, défrisage ou non, qui ne remettent pas en cause notre africanité. C'est donc un bonheur de transmettre moi-même un peu de ce savoir au quotidien.
Il y a cependant des questions qui, je dois le dire, me perturbent. Simplement parce qu'elles reflètent un plus grand problème de société. Je vois régulièrement des mères s'interroger sur les cheveux de leurs enfants, souvent de moins de trois ans. On me demande incessamment « quel soin faire pour qu'elle ait de longs cheveux ? ». Pour les plus grandes, on me demande « Ses cheveux sont trop durs, est-ce que je peux la défriser ? ». Les mères se plaignent parce que leur enfant n'a que très peu de cheveux et « tout le monde me demande pourquoi elle n'a pas de cheveux ». Une maman d'un bébé d'environs 6 mois m'a déjà demandé une routine capillaire, car l'enfant n'avait « pas de cheveux ». Une autre, d’un enfant du même âge, m’expliquait qu’elle avait beau couper, les cheveux ne repoussaient pas « bien ». Bien sûr, ces questions concernent essentiellement les petites filles.
La plupart des mamans qui m'approchent m'avouent que ce sont les remarques de leur entourage qui les inquiètent. Pour beaucoup, elles cherchent à faire au mieux pour leur enfant et à éviter les jugements.
Mais ce stress, cette pression que nous mettons déjà, si tôt, sur les têtes de nos filles, peuvent les suivre toute leur vie. Inconsciemment, l’entourage projette sur elles leurs peurs et la vision de la femme qui doit, déjà, avoir de beaux et longs cheveux. Nous mentionnons devant nos filles que leurs cheveux sont « mauvais » et « durs ». Alors qu’en réalité, c’est notre savoir et notre capacité à en prendre soin qui sont malheureusement limités. Lorsque l’on dit « tes cheveux sont trop durs » en réalité nous disons « je ne sais pas comment les rendre doux ».
On rasera les cheveux une millième fois, à la recherche de la tête parfaite. Pourquoi ? On ne sait pas vraiment. Je ne parle pas ici du rasage culturel, mais de celui fait avec la seule intention de retrouver de « meilleurs cheveux ». On se plaindra que ses cheveux sont trop « crépus », qu'elle a pris les « mauvais cheveux de sa mère ». On se raccrochera à des « Pourtant sa grand-mère est Peulh et avait de si beaux cheveux ». Tout pour ne pas accepter la vérité en face : les cheveux crépus sont beaux, et les cheveux des enfants ont besoin de temps.
Nous vivons dans une société malade, au point où les cheveux d’un enfant qui vient de naître sont sujets à discussion. Où certaines mettent des perruques à des enfants de deux ans, pour la rendre plus « jolie ». Quel message souhaitons nous envoyer ? Je ne juge pas, mais j’appelle à remettre en question notre vision des choses.
Alors, que faire en tant que parent ? Allons un peu dans la pratique. Hé bien avant 2 ans, la pousse et la longueur est presque aléatoire. Sauf véritable problème médical, il n’y a rien à faire à part attendre, et ne pas empirer la situation. La pousse des cheveux, surtout à cet âge, dépend d'énormément de facteurs. La génétique, les hormones, les positions pour dormir, sont autant de choses qui jouent. Entre 0 et 7 mois, de nombreux enfants ont des zones « chauves » simplement parce qu'ils sont souvent allongés sur un côté ou un autre. Il est aussi commun d’avoir une chute de cheveux sur certaines zones, en raison de la fluctuation des hormones après la naissance.
D'autres facteurs bénins peuvent également expliquer des zones chauves. L'important est de comprendre que c'est tout à fait normal dans cette tranche d’âge.
Il en va de même pour la pousse. Un bébé qui a des cheveux courts, c'est normal. Cela ne veut pas dire qu'il aura des cheveux courts toute sa vie. Tout son corps est encore en « construction ». La pousse peut ne pas être régulière avant 2 ans. Il y a lieu de consulter un docteur quand un enfant ne possède pas du tout de cheveux à ses 1 an, ou toujours très peu à ses 2 ans. Ce sera l’occasion de vérifier de possibles problèmes dermatologiques ou carences. Il faut également consulter un pédiatre si l'on constate des plaques, des boutons, etc. sur le cuir chevelu. En cas de doute sur quoi que ce soit, préférez l’avis du pédiatre à celui de la voisine qui vous dit d’appliquer un peu de Madar sur les tempes.
En termes de soin et coiffure, il faut éviter tout ce qui crée de la tension sur le cuir chevelu. Chouchou serrés, tresses, sont à éviter pour un bébé, même quand il a déjà une certaine longueur. Leur cuir chevelu est fragile et vous risquez de l’endommager.
Un savon doux et adapté, de temps en temps, suffit pour nettoyer. Surtout pas tous les jours. Un peu d’huile ou de beurre pendant la semaine et le tour est joué.
Bien sûr, il s’agit ici de règles générales. Il y a des cas particuliers. Malheureusement, pour beaucoup, nous ne savons simplement pas comment nous occuper des cheveux afro naturels. Comment les aimer, sans contrainte. Si certaines le souhaitent, je serai heureuse d’en discuter et de les aider à naviguer ces eaux troubles. Je suis @sama.queendom sur Instagram.
Bref, tout ceci est question de savoir. Faisons l’effort de le rechercher. Car une fois que nous aurons fait ce travail, il se peut que toutes les générations qui suivent n’aient pas à le faire. Elles sauront.
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